Successions Internationales: Combien ? Quand ? à Qui ?

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Une succession est dite "internationale" dès lors que l’un de ses éléments constitutifs est étranger : si le défunt détenait au moins un bien légué dans un pays autre que celui de sa nationalité ou de sa résidence, s’il décède dans un pays étranger, ou encore si l’un des héritiers est de nationalité étrangère.

 

Depuis l’entrée en vigueur du règlement européen n° 650/2012 le 17 aout 2015, les successions internationales se sont vues simplifiées, du moins en théorie.

Ce règlement est applicable à toutes les successions internationales à compter du 17 aout 2015 dans l’Union Européenne excepté l’Irlande et le Danemark. Il régit les aspects de droit civil des successions et non la fiscalité c’est‑à‑dire : qui hérite ? de quelle proportion ? sous quels délais ? etc. La fiscalité des droits de succession sera quant à elle déterminée selon la résidence du défunt, des héritiers et du lieu de situation des biens légués etc.

 

Une succession soumise au droit de l’État de résidence du défunt…

L’article 21§1 du règlement établi le principe suivant : Sauf disposition contraire, la loi applicable à la succession est la loi de l’État dans lequel se trouvait la dernière résidence habituelle du défunt, même s’il s’agit de la loi d’un État non‑membre de l’Union Européenne.

Exemple (UE)

Julie Dupont, de nationalité Française et résidant habituellement à Milan, décède le 1er juillet 2021 sans avoir laissé de testament. Elle possède des biens mobiliers et immobiliers en France et en Italie.

En application de l’article 21§1 précité, le droit de l’État ou se trouve sa dernière résidence est applicable à l’ensemble de la succession.

Dès lors, l’ensemble de ses biens mobiliers et immobiliers seront soumis au droit des successions italien.

 

Exemple (UE/hors UE)

Richard Martin, de nationalité Française et résidant habituellement à Nice décède le 1er juillet 2021 sans avoir laissé de testament. Il possède des biens immobiliers en France et au Royaume‑Uni.

En application de l’article 21§1 précité, le droit français désigne la loi française comme seule loi applicable aux biens mobiliers et immobiliers. Le droit français devrait donc s’appliquer à l’ensemble des biens mobiliers et immobiliers. Cependant, le Royaume‑Uni ne fait pas parti de l’Union européenne et le droit anglais désigne la loi de situation de l’immeuble pour les biens immobiliers.

Dès lors, les biens immobiliers situés en France seront soumis au droit des successions français tandis que les biens immobiliers situés au Royaume‑Uni seront soumis au droit des successions anglais.

 

Exemple (UE/hors UE)

Mary Smith, de nationalité britannique résidant habituellement à Londres, décède le 1er juillet 2021 sans avoir laissé de testament. Elle possède des biens meubles et immeubles en France et au Royaume‑Uni.

En application de l’article 21§1 précité, le droit français désigne la loi anglaise comme seule loi applicable aux biens mobiliers et immobiliers. Cependant, le droit anglais désigne la loi de situation de l’immeuble pour les biens immobiliers et la loi du domicile pour les biens mobiliers.

Dès lors, si l’ensemble des biens meubles ainsi que les biens immeubles situés au Royaume‑Uni sont soumis au droit anglais, les biens immeubles situés en France sont soumis au Droit Français grâce au mécanisme de renvoi de la loi anglaise vers la loi française.

 

…ou au droit de l’État choisi par le défunt

L’article 22§1 du même règlement prévoit la possibilité de choisir d’appliquer à sa succession, la loi d’un des États dont on possède la nationalité, même s’il s’agit de la loi d’un État tiers à l’Union européenne.

Exemple (UE)

Pedro Lopez, de nationalité espagnole et résidant habituellement à Paris, possède des biens meubles et immeubles en France et en Espagne. Il décède le 1er juillet 2021 et son testament, établi en France, prévoit l’application de la loi espagnole à sa succession.

En application de l’article 22§1 précité, le droit français désigne la loi espagnole comme seule loi applicable aux biens mobiliers et immobiliers.

Dès lors, l’ensemble des biens meubles et immeubles seront soumis au droit des successions espagnol.

 

Exemple (UE/hors UE)

Jim Anderson, de nationalité britannique et résidant habituellement à Londres, possède des biens meubles et immeubles en France et au Royaume‑Uni. Il décède le 1er juillet 2021 et son testament, établi au Royaume‑Uni, prévoit l’application de la loi anglaise à sa succession.

En application de l’article 22§1 précité, le droit français désigne la loi anglaise comme seule loi applicable aux biens mobiliers et immobiliers, même s’il s’agit de la loi d’un État tiers à l’Union européenne. Dans la mesure ou le défunt à rédigé un testament, le renvoi à la loi française ne sera pas appliqué et le droit anglais sera appliqué à l’ensemble de sa succession.

Dès lors, l’ensemble des biens meubles et immeubles seront soumis au droit anglais.

 

Exemple (UE/hors UE)

Jeanne Dubois, de nationalité française et résidant habituellement à Londres, possède des biens immeubles en France et au Royaume‑Uni. Elle décède le 1er juillet 2021 et son testament, établi en France, prévoit l’application de la loi française à sa succession.

En application de l’article 22§1 précité, le droit français désigne la loi française comme seule loi applicable aux biens mobiliers et immobiliers. Dans la mesure ou le Royaume‑Uni est un État tiers à l’Union européenne, la désignation de la loi française dans le testament établi en France ne sera pas reconnue au Royaume‑Uni pour les biens qui y sont situés.

Dès lors, les biens immeubles situés en France seront soumis au droit français et les biens immeubles situés au Royaume‑Uni seront soumis au droit anglais.

 

 

… mais attention au droit de prélèvement prévu par la loi française

La loi française n°2021‑1109 du 24 août 2021 met en place un droit de prélèvement compensatoire lorsqu’une loi étrangère est appliquée à une succession internationale.

Chaque enfant, ses héritiers ou ses ayants‑cause, peut effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existant situés en France au jour du décès si les conditions suivantes sont remplies :

  • la loi étrangère ne possède pas de mécanisme réservataire protecteur des enfants ; et
  • le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un État membre de l’Union européenne ou y réside habituellement

Exemple

Jack Cooper, de nationalité anglaise et résidant habituellement à Londres possède un bien en France de 300.000 euros et un bien au Royaume‑Uni de 600.000 euros. Il a une fille de nationalité britannique et un fils de nationalité franco‑britannique. Il décède le 1er juillet 2021 et son testament, établi au Royaume‑Uni, prévoit l’application de la loi anglaise à sa succession. Conformément à la loi britannique, son testament désigne sa fille comme seule et unique légataire, excluant de facto son fils de sa succession.

Cependant, en application de la loi française du 24 août 2021, son fils peut effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens mobiliers et immobiliers situés en France car :

  • la loi britannique ne prévoit pas de mécanisme réservataire protecteur des enfants ; et
  • il est ressortissant d’un État membre de l’Union européenne.

Dès lors, si l’ensemble des biens sont effectivement soumis au droit anglais, l’héritier lésé peut cependant procéder à un prélèvement compensatoire sur les biens situés en France pour un montant s’élevant à un tiers de la masse globale des biens existants, soit 300.000 euros (900.000 / 3 = 300.000).

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